Après quelques temps de préparation, Eldin quitta Orgrimmar, comme convenu auprès de Dragosh et Ladokh, et parti s'isoler dans le désert vaste des Tarides. Il avait espéré que cette expérience l'aiderait à forger des liens plus forts avec son compagnon lupin, dont il ne connaissait pas encore le nom. Les deux se mirent en route, et entreprirent un long voyage.
Les premiers jours furent difficiles, le loup avait donné une chance à Eldin, maintenant il attendait que l'elfe fasse ses preuves. Eldin pour sa part ne savait pas trop comment traité le loup. Comme un animal de compagnie ? Non, celui-ci était bien plus grand, et surtout bien plus puissant que n'importe quel animal de compagnie. Et cette lueur dans son regard, une intelligence vive et brûlante telle une flamme luisait en eux.
Eldin avait tenté de lui offrir la viande d'un animal qu'il avait abattu à l'aide de la magie, mais le loup refusa de manger. Il avait tenter de lui offrir de l'eau qu'il avait conjuré, mais le loup refusa également de boire. Ce manège dura plusieurs jours, et Eldin commençait à songer à rentrer à Orgrimmar, en ayant échoué à former des liens plus fort avec le loup. Il était épuisé par le voyage et la chaleur. Il avait refusé de monter la bête, pensant que pour lui montrer qu'il la voyait comme son égale, il marcherait à ses côtés. Mais après plusieurs jours à airer, perdu dans le désert sans fin des Tarides, au bord de l'épuisement, affamé et assoiffé, le loup s'écroula de fatigue. Voyant le mastodonte animal écroulé, Eldin fut saisi au cœur. Il ne l'abandonnerai pas. Il tenta de faire boire le loup, mais il lui parut évident qu'il faudrait plusieurs jours de repos à la bête pour recouvrer ses forces. Il se résolu alors à porter son compagnon du mieux qu'il put, jusqu'à un oasis semblant se dessiner à l'horizon. Mais à mesure qu'ils approchaient de cette source de salue, Eldin put entrevoir une bande de centaures chargeant de leur direction. Malgré son propre état d'épuisement, Eldin était encore assez lucide pour réaliser que, dans son état, il ne faisait pas le poids face à une bande de maraudeurs centaures. Dans un dernier élan de désespoir, il conjura tout le feu de la haine qui dormait en lui en noyant les maraudeurs dans un déluge de flammes, puis sombra dans les ténèbres.
Douces, réconfortantes, paisibles. Sans pour autant sentir ses paupières bouger, il commença à apercevoir des formes face à lui. D'abord inondée par la lumière, sa vision s'éclaircit : c'était l'île de Quel'danas, comme il s'en souvenait dans son enfance. Était-il mort ? Quelle douce pensée de se dire que son au-delà personnel était son propre foyer, libre des balafres dont l'histoire l'avait marqué. Instinctivement il tourna la tête vers la direction où la tombe de son cousin se trouvait. En lieu et place de l'édifice élégant où reposait le prince Kael, une montagne colossal s'élançait vers les cieux, et à son sommet, un titan sylvanien dans les branches partaient se perdre dans les voûtes céleste se tenait, haut et majestueux. L'image lui inspirait un sentiment de paix profond, et pourtant, il savait qu'en ces lieux, jamais un tel arbre et une telle montagne ne s'étaient dressés au delà de l'océan. Lorsqu'il tourna à nouveau son regard vers le mouillage des confins du soleil, il se vit face à son grand loup, maintenant plus grand encore, le toisant de deux fois sa hauteur passée. La bête renifla son visage, et le lécha une fois, puis une deuxième.
Eldin ne pu s'empêcher d'exprimer un certain amusement. Ils avaient partagé leurs derniers moments, il semblait juste que les deux compagnons se voient réuni dans l'après-vie.
"Je m'appelle Kiva." La louve s'était assise aux côtés d'Eldin, et tout deux contemplait le couché de soleil sans fin devant eux.
C'était donc une femelle. Et dire qu'il l'avait à plusieurs reprises appelé par des surnoms masculins. Eldin ne put s'empêcher d'être pris de quelques remords.
"Ce n'est rien, je ne me vexe pas pour des choses comme ça."
Avait-elle lu dans son esprit ?
"Ici, les pensées sont des paroles, c'est aussi pour ça que je peux te parler."
:: Où sommes nous ? ::
"Pas dans l'après-vie, petit prince. Nous sommes dans ton esprit."
:: Dans mon ... Ne sommes-nous pas mort ? ::
"Non, petit prince. Mais nous avons failli."
Eldin tenta de sortir de la torpeur, mais une douleur vive sembla saisir tout son être, comme si un éclair l'avait traversé du fond de ses orbites, jusqu'à l'arrière de son crâne, en traversant tout son corps au passage.
"Je ne le conseillerais pas. Toi comme moi nous avons tous les deux frôlé la mort, le repos, ici, est crucial, surtout pour ce qui nous attend."
:: Ce qui nous attend ? ::
"Oui, cet endroit de ton esprit cache de nombreux secrets, petit prince. Laisse ton regard glisser d'un endroit à l'autre, laisse le se poser, et vois."
D'abord incertain, Eldin se vit lentement poser le regard vers les Confins du Soleil, et une vision l'envahit. Il voyait devant lui des images d'un événement chaotique, comme si différent souvenir semblaient se confondre et se mélanger dans son esprit. Il voyait de nombreux elfes fuir le plateau du Puit de Soleil, vers des navires. Kael'thas et Rommath faisaient marche vers le Puit, Kael tenant en sa main les trois cristaux de lune qui avivaient jadis Ban'dinoriel, la barrière impénétrable qui eut préservé la civilisation elfique jusqu'alors. Il se souvenait clairement de ce jour, c'était celui où le Puit de Soleil avait été anéanti pour sauver le peu des survivants au massacre du Fléau. Mais il se souvenait également que le magistère Astalor Ligesang avait aidé Rommath et Kael à l'époque, et dans cette version de souvenir, il ne voyait que Rommath, Kael et ... Aleszyl Sâcresoleil ?
Son mentor avait les cheveux attachés dans son dos, un style inhabituel pour lui, et semblait avoir souffert de combat récent.
:: Il n'était pas sur l'île quand ces événements ont eu lieu. ::
"Il te faudra démêler les mirages des vrais images à travers ce brouillard, Eldin."
Kael'thas confia les cristaux à Rommath et Aleszyl, puis se tourna vers Eldin, et lui remis un petit flacon familier, empli jusqu'au goulot d'un liquide lumineux et luisant de puissance.
:: Ça ne s'est pas passé ainsi. Je faisais partie de ceux sur les bateaux, ceux qu'on évacuait. Et Rommath ne m'a confié cette fiole que bien plu- ::
"Regarde."
Kael plaça une main sur la nuque d'Eldin, et colla leur deux fronts.
"Tu devras être un symbole d'espoir pour notre peuple, mon frère." lui dit-il.
:: Il ne m'a jamais parlé à cette époque, notre première discussion a eu lieu des mois plus tard. Et nous étions à peine cousins, pourquoi m'appelle-t-il son frère ? ::
Etait-ce la pluie ou les larmes qui coulait du regard azuré de Kael ? A cet instant, Eldin réalisa que ces même larmes avaient entamé leur mouvement sur de nombreux autres visages. Des cris de désespoir, de colère, de haine, non sans similarités avec ses propres cris d'agonie à la vue de la chute de leur royaume. Et des mots de mépris, de dégoût, de chagrin. Mais aucun n'était dirigé à la horde des Morts. Non, ils allaient à ... l'Alliance ?
Nombreux se battaient et luttaient pour rester et défendre leur foyer jusqu'à la fin, mais ils étaient tôt ou tard tous emmené sur les navires en partance du port.
Par des trolls aux visages affligés par la souffrance résonnante des elfes dont on était en train de voler l'héritage et le foyer une nouvelle fois.
Par des orcs cherchant à sauver ceux dont la témérité naissait plus de l'inconscience et du désespoir, que du courage.
Par des taurens, tentant tant bien que mal d'appaiser la douleur et le tourment des Sin'dorei, dont le sang macculait à nouveau la Haute Demeure.
:: Est-ce une vision de l'avenir ? ::
"Non. Et peut-être oui."
Kael'thas regarda Eldin droit dans les yeux, le visage marqué par le désespoir. Il lui tendait toujours la fiole, dans l'attente que son cousin la prenne. Eldin s’exécuta.
"Va maintenant, petit." Kael fit un mouvement de la tête en direction des évacués. "Ils auront besoin de toi, et de ça." Il pressa la fiole d'eau du Puit Solaire contre la poitrine d'Eldin.
"N'oublie pas le Puit de Soleil." Sur ces mots, Kael, Rommath, Aleszyl, et bien d'autres, s'engoufrèrent dans la brasier qu'était devenu le Plateau du Puit.
La seule image qui suivit fut celle d'Eldin, la fiole à la main, sur l'un des navires, regardant en direction de Quel'danas, des soldats des autres races de la Horde à ses côtés, et d'un bruit d'explosion assourdissant, à faire trembler les fondements de la terre, accompagné d'un flash de pure lumière, et des lamentations de peuple Sin'dorei, sauf, mais à présent déshérité de tout.
"Ne laisse pas ton cœur être troublé par le chagrin, petit prince, la fin est encore très loin, pour toi comme pour ton peuple."
Eldin laissa son regard flotter à nouveau jusqu'à l'image calmante du mont Hyjal, si étrangement placé dans son esprit.
Les yeux fermés, il crut sentir une légère brise caresser une partie de son dos, ses bras et son visage. Il entendit une voix douce, chaude, rassurante, se prendre d'un léger rire, presque inaudible, et lui murmurer :
"Il est temps de se réveiller, mon amour."
Il senti une main lui passer délicatement sur le dos. La tendresse et la douceur avec laquelle elle glissait contrastaient avec la rugosité de son contact. Le labeur avait laissé sa marque sur cette main, mais ne lui avait pas ôté son expressivité.
Eldin se senti sourire, puis clignant lentement des yeux, découvrit une chambre à l'architecture inconnue. Son style lui rappelait l'architecture de Suramar d'une certaine façon, ou peut-être l'architecture des plus anciennes structures de Quel'thalas, mais elle avait quelque chose de clairement Kaldorei. Depuis sa litière, il pouvait apercevoir une étagère typiquement thalassienne, suspendue dans les airs et tournant sur elle-même grâce à la magie. Des draperies translucides agrémentaient le plafond, et bordaient de chaque côté une ouverture vers un balcon. Son regard se dirigea brièvement vers la direction d'où provenait la voix qui l'avait éveillé. Malgré ça concentration cependant, il ne parvint pas du tout à distinguer les traits de l'individu, mais vraisemblablement, il n'était pas dérangé par ce fait, et la présence de cette autre personne lui procurait réconfort et bien-être. Il se leva, la vue toujours trouble, incertaine. Comme si son esprit n'était pas certains de l'image qu'il devait manifester. Enfilant négligemment une robe de chambre de satin léger, il se mit en marche vers le balcon. Et la vision qui l'accueilli le fit trembler, non pas de peur ou de colère, comme sa vision du Puit l'avait fait, mais d'émerveillement et d’allégresse.
Devant lui, une vaste cité elfe antique s'étendait, vibrante de vie et de magie, perdue au milieu d'une vaste forêt primordiale aux arbres sans age. Les rues étaient noires de monde, des milliers d'elfes y vaquaient à leurs occupations journalières. Partout des lumières, des drapeaux, des tentures s'agitait avec l'air frais du matin. Mais la vision la plus saisissante qu'il lui fut donné d'admirer cependant se tenait dans une court à quelques dizaines de mètres à peine du large édifice duquel s'élançait son balcon.
Au centre de cette grande court ceinturé de hautes murailles, un grand bassin avait été creusé, et ornementé de peintures et de sculptures de toute beauté. Mais la vrai merveille se trouvait dans le bassin ; une source aux eaux scintillantes, aux nuances parfois dorées, parfois bleutée, parfois d'une rose violacé pur, et toujours rayonnante. La lumière de ce lac, de ce Puit, ainsi que sa magie, circulait à travers toute la cité, et ça et là, Eldin remarqua des arbres semblables à ceux du Bois des Chants-Éternels, mais aussi des arbres ressemblant aux variétés de Suramar, formant de larges parcs.
Contemplant cette source de puissance et de vie, Eldin sentit des mains, puis des bras, l'enlacer, et un menton se poser sur son épaule. La sensation de contact entre les deux peaux lui paru si réel qu'il fut saisi de frissons qu'il pu sentir à travers sa torpeur.
"Ils n'attendent que toi mon amour. Va, les Enfants du Noble Sang comptent sur toi. Tu leur a rappelé qu'il suffit d'une cendre à un phénix pour raviver ses flammes."
Il senti un baiser se poser dans son cou, puis en un battement de cils, il était à nouveau sur Quel'danas, dans le village de son enfance.
:: Quel était cet endroit ? Cela semblait si ... inespéré, et irréel. ::
"Une terre où la lumière des étoiles ne ternie jamais, petit prince."
:: Kalimdor ? ::
La louve ne répondit pas dans un premier temps, faisant un cercle autour de lui avant de s'asseoir face à lui.
"Pas le Kalimdor que l'esprit hurleur désir."
:: Sylvanas ... Oui, je vois ce que tu veux dire Kiva. ::
"Mais l'espoir perdure, petit Eldin. L'esprit hurleur peut ronger les bras et les jambes de la Horde, de la Vrai Horde. Mais jamais elle ne touchera son cœur."
:: Nous ne la laisserons pas. ::
"Oui, trouve la force en ta meute. L'unité."
Eldin acquiesça en esprit, puis lança un œil alentour.
:: Me reste-t-il encore des choses à voir Kiva ? ::
La louve prit un temps avant de répondre, plongeant son regard vert dans celui d'Eldin.
"Oui, mais pas maintenant. Il est temps de te réveiller à présent. Mais lorsque le moment sera venu, nous nous retrouverons ici, et alors tu verras. Tiens toi prêt lorsque Ceux-dessous-les-flots s'élèveront, ce sera le signal."
Eldin prit un temps, puis posa :
:: Tu es plus qu'une simple monture n'est-ce pas ? ::
Eldin cru un court instant que Kiva lui sourit, puis la louve de lui répondre.
"C'est un sujet mieux discuté lorsque tu seras.
Réveillé !"
Subitement, Eldin se vit arraché à son sommeil, ses yeux s'ouvrant d'un coup, accompagné d'une inspiration paniquée.
"Du calme mec. Le juju, il a bien marché, mais il faut pas pousser tout de suite."
La voix qui s'adressait à lui était trolle, l'accent trahissant clairement l'origine Sombrelance de celui qui se tenait près d'un petit feu de camp.
"- Sale mojo avec les centaures mec. J'aurais pas aimé être à leur place. Heureusement que je vous ai vu, toi et ton loup de guerre, sinon vous seriez tout les deux morts là-bas." Le troll pressait de la main une mixture à la couleur malsaine, mais à l'odeur de sève.
- Vous nous avez sauvez ?
- Bah ouais. On abandonne pas des frères de la Horde." Malgré sa tentative d'afficher un air de conviction, celle-ci ne se traduisait pas dans ses mots. Un sentiment qu'Eldin lui-aussi partageait.
"- Merci ... Comment vous appelez-vous ?
- Moi c'est Zul'kiss, des Sombrelances. Et toi ?
- Je m'appelle Eldin, et voici-
- Kiva, je sais."
La louve était assoupie aux côtés d'Eldin.
"- Hehehe, tu crois que tu es le seule avec qui elle discute ?" Le troll était visiblement amusé. "Les chamans, il savent parler avec les esprits, et ton amie, elle a un esprit fort. Elle s'est réveillé il y'a quelques jours et elle m'a aidé à te guérir.
- Quelques jours ? Depuis combien de temps suis-je endormi ?
- Oh bah tu sais, quand je vous ai trouvé ça devait faire quelques heures que vous aviez perdu connaissance tout les deux. Après il a fallut que je vous traîne ici tout seul. Alors je dirais, bah ... une semaine.
- Une semaine ?"
Il aurait été prêt à juré qu'il ne s'était agis que de quelques heures.
Eldin ne remarquait que maintenant l'environnement autour de lui. Il était dans une caverne fraîche et humide, et à l'extérieur, il parvenait à entrevoir de la verdure et une étendue d'eau. Il s'agissait sans doutes de l'un des oasis du sud des Tarides.
"- Oui, ça a pris de temps de vous remettre sur pied. Vous aviez vraiment pas la forme quand je suis tombé sur vous. Mais je pense que là, elle et toi vous pouvez y aller mec."
Eldin se releva en douceur pour ramasser ses biens, puis remercia le troll. Il monta sur le dos de Kiva, avant de faire demi-tour pour s'adresser au troll.
"- Merci pour tout, Zul'kiss. Si à n'importe quel moment vous avez besoin d'aide, ou de quoi que ce soit ..." Eldin matérialisa un petit cristal rouge qu'il tendit au troll. " Utilise le, et je vous viendrai en aide. On n'abandonne jamais un frère de la Horde."
Le troll esquissa un rictus amusé, et lança à Eldin :
"- Pour la Horde, mec !
- Pour la Horde !"
D'un signe de la tête entendu, les deux hommes se séparèrent, et Eldin entreprit le chemin retour vers Orgrimmar.
"Viens Kiva, il est temps de rejoindre la meute."